Une manip de geophysique marine

L'île de La Réunion a été créée par un des volcans les plus actifs de la planète. Il est admis que celui-ci est l’expression la plus récente d’un panache mantellique ayant donné naissance à un point chaud en surface, dont l’activité aurait débuté par la formation des trapps du Deccan en Inde il y a 65 Ma. Ces trapps représentent une des plus vastes régions d'épanchement volcanique au monde et leur mise en place a eu un impact majeur sur le climat et la vie sur Terre. Mais la genèse et l’origine en profondeur de ce panache reste très controversée.

 

A travers le projet RHUM-RUM, nous proposons d'imager la structure du panache et du point chaud de La Réunion depuis sa tête jusqu'à sa base et d'étudier la dynamique et les mécanismes qui ont alimentés le point chaud. Est-ce un panache mantellique "classique" formé d'un conduit étroit et trouvant sa source à la limite manteau-noyau ou dans la zone de transition? Existe-t-il une interaction dynamique et un échange de matière entre l'anomalie du "superplume" sud Africain et le point chaud? N'y a-t-il aucune connexion avec ces structures? Quelle est la relation entre le point chaud, la rides de Rodrigues et la ride Centrale indienne? Quelle est l'interaction du point chaud avec la zone de transition et avec la lithosphère océanique et ses hétérogénéités (paléo-ride, zone de fracture)? L'objectif du projet RHUM-RUM est de caractériser la géométrie de ce panache – ou son absence – depuis la surface jusqu'à la limite manteau-noyau mais également de cartographier et quantifier les mouvements de matière associés: flux verticaux dans le conduit du panache et flux latéraux de l'épanchement du panache sous la lithosphère océanique. Les outils fournis par la sismologie et la gravimétrie seront mis en œuvre à cette fin.

La source des points chauds est largement discutée: à gauche, modèles de points chauds proposés par Courtillot et al. (2003) et à droite, moèles de points chauds proposés par Anderson (2004)

Dans le cadre du projet RHUM-RUM, et pour pouvoir imager la structure du manteau supérieur et inférieur sous La Réunion, nous proposons de déployer des stations sismologiques sur une superficie de 2000x2000 km2 centrée sur La Réunion. 57 stations OBS (ocean bottom stations) seront placées en fond de mer autour de La Réunion et sur les rides centrale et sud-ouest indienne, offrant ainsi l'opportunité d'étudier également la structure de ces rides lentes et ultra lentes et leurs interactions avec le point chaud. Les déploiements de stations en fond de mer seront complétés par des stations terrestres déployées sur La Réunion, Madagascar, les Seychelles, Maurice, Rodrigues et les îles Éparses.

Ce projet est triplement ambitieux, par les objectif scientifique visés, par le nombre d'instruments large bande que nous proposons de déployer et par la taille du réseau envisagé. Il repose sur une collaboration franco-allemande très étroite permettant de mettre en commun des expertises scientifiques complémentaires, des moyens techniques (OBS et stations terrestres) et des moyens logistiques (navire océanographique), sans lesquels cette expérience ne serait pas réalisable ni les objectifs scientifiques d’imagerie du panache atteints